Ce quartier de Biarritz ne s’appellera plus “La Négresse” !
Ce jeudi 6 février, la justice a rendu sa décision, suite à une procédure initiée en 2020 par l'association Mémoires et partages. Cette dernière, qui œuvre pour la valorisation du travail de ...
Ce jeudi 6 février, la justice a rendu sa décision, suite à une procédure initiée en 2020 par l'association Mémoires et partages. Cette dernière, qui œuvre pour la valorisation du travail de mémoire et des héritages liés à la colonisation, avait engagé des poursuites contre la Ville de Biarritz, située dans les Pyrénées-Atlantiques.
L'origine du nom reste floue, mais le tribunal estime que, peu importe les racines supposées de cette appellation et l'importance historique que la ville de Biarritz lui attribue, l'expression "La Négresse" renvoie aujourd'hui, de manière péjorative, à la race d'une femme dont l'identité n'a même pas été clairement établie.
Selon les historiens, le quartier connu sous le nom de « La Négresse » aurait été renommé ainsi au début du XIXe siècle par des soldats de Napoléon, qui l'appelaient auparavant "hameau de Harausta". Ce changement de nom serait dû à la présence d'une auberge gérée par une femme à la peau très foncée. Ce nouveau nom aurait progressivement remplacé l'appellation basque à partir de 1851, comme l'indique la cour administrative d’appel. Par ailleurs, certaines sources suggèrent que ce nom pourrait également être lié à l'expression gasconne « lane gresse », qui fait référence à une terre argileuse que l'on trouve dans cette zone de la commune.
La cour a répondu à la demande de l'association Mémoires et Partages en ordonnant au maire de Biarritz de soumettre au conseil municipal une proposition visant à annuler les décisions qui ont donné le nom « La Négresse » à un quartier et à une rue de la ville. Cette démarche souligne l'importance de la réévaluation des noms de lieux qui peuvent être perçus comme offensants ou inappropriés dans le contexte actuel.
En effet, par le biais de deux délibérations, l'une datant du 22 octobre 1861 et l'autre du 1er juillet 1986, la ville de Biarritz a choisi d'appeler un quartier et une nouvelle rue « La Négresse ». Ces décisions, bien qu'elles aient été prises dans un autre contexte historique, sont aujourd'hui remises en question, reflétant une volonté de la part de la communauté de s'engager dans une réflexion plus profonde sur la signification et l'impact des noms que nous donnons à nos espaces publics.
L'association Mémoires et Partages a sollicité la maire de la commune pour qu'elle annule certaines délibérations. Comme la maire a refusé de répondre favorablement à cette requête, l'association a décidé de porter l'affaire devant le tribunal administratif de Pau, qui a finalement rejeté son recours dans un jugement rendu le 21 décembre 2023. Cependant, après avoir fait appel, la cour a accepté la demande de l'association Mémoires et Partages.
La cour a donc décidé d'annuler la décision contestée et demande à la maire de Biarritz de convoquer le conseil municipal dans un délai de trois mois. Ce dernier est le seul habilité à statuer sur le changement de nom d'un lieu-dit dans la commune. Il est donc chargé de procéder à l'abrogation des délibérations qui avaient attribué le nom de « La Négresse » à un quartier et une rue de la ville.
Pour Karfa Diallo, fondateur-directeur du réseau
« C’est le triomphe du droit et des valeurs républicaines. Débaptiser le quartier La Négresse s’imposait depuis longtemps, tant ce terme participe de la banalisation d’un archétype raciste, à une époque où notre vigilance doit être plus que jamais renforcée. La Ville de Biarritz a maintenant l’obligation, dans un délai de trois mois, d’abroger les délibérations municipales qui ont validé ces clivages racistes et ces clichés sexistes sur l’espace public. J’appelle les élus de Biarritz à la responsabilité et nous continuerons à leur tendre la main pour faire la pédagogie de cette décision de justice. Dans un contexte national et international où les idéologies d’extrême droite ont préempté les débats citoyens autour de l’Anti-Repentance, une telle décision fera jurisprudence en renforçant notre détermination à lutter contre le racisme et les inégalités.»